Les litiges commerciaux au Maroc peuvent être appréhendés et résolus par différentes voies, principalement par le recours aux tribunaux étatiques (contentieux judiciaire) ou par le biais de l'arbitrage, un mode alternatif de résolution des différends.
La voie judiciaire (contentieux devant les tribunaux de commerce)
Les litiges entre commerçants ou relatifs aux actes de commerce relèvent, en première instance, de la compétence des tribunaux de commerce. Ces juridictions spécialisées ont été créées au Maroc par la loi n°53-95 (formant Code de commerce) et sont présentes dans les principales villes comme Casablanca, Rabat, Tanger, etc.
Procédure type : La procédure devant les tribunaux de commerce commence souvent par une tentative de conciliation, qui est même obligatoire dans certaines matières, ou par des procédures rapides comme l'injonction de payer pour les créances certaines, liquides et exigibles. En cas d'échec de la conciliation ou si la nature du litige l'exige, l'affaire est jugée au fond après un échange d'écritures (requêtes, mémoires) entre les parties. La durée d'une procédure judiciaire peut être relativement longue, s'étalant parfois sur un à trois ans, voire plus en cas d'appel. Les décisions des tribunaux de commerce sont susceptibles d'appel devant la Cour d'appel de commerce (ou la chambre commerciale de la Cour d'appel). En dernier ressort, un pourvoi en cassation peut être formé devant la Cour de cassation du Maroc (conformément, par exemple, à l'article 74 du Dahir des Obligations et Contrats pour certains aspects).
Avantages et inconvénients : Le recours aux tribunaux étatiques offre la sécurité juridique d'un système institutionnalisé avec des voies de recours établies. Les juges des tribunaux de commerce sont spécialisés en matière commerciale. Cependant, les audiences sont généralement publiques, ce qui peut ne pas convenir aux litiges nécessitant la confidentialité. De plus, bien que spécialisés, les juges peuvent ne pas toujours posséder une expertise technique pointue dans des secteurs très spécifiques. Il est possible d'obtenir des mesures conservatoires (comme une hypothèque judiciaire ou une saisie conservatoire) avant ou pendant le procès pour garantir l'exécution future du jugement.
L'arbitrage commercial
L'arbitrage est un mode conventionnel de règlement des litiges par lequel les parties s'accordent pour soumettre leur différend à un ou plusieurs arbitres (un tribunal arbitral) qui rendront une décision contraignante (la sentence arbitrale). Au Maroc, l'arbitrage commercial est régi par la loi n°08-05 du 21 février 2006, significativement modifiée et complétée par la loi n°95-17 de 2017.
Mise en œuvre : Les parties peuvent convenir de recourir à l'arbitrage soit en insérant une clause compromissoire dans leur contrat (avant la naissance de tout litige), soit en concluant un compromis d'arbitrage (une fois le litige né). L'arbitrage peut être national (si tous les éléments du litige sont localisés au Maroc) ou international (notamment si l'une des parties est étrangère ou si les intérêts du commerce international sont en jeu). Des centres d'arbitrage institutionnel, comme le Centre de Médiation et d’Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale du Maroc (CMAC) à Casablanca, proposent des règlements d'arbitrage et administrent les procédures, facilitant ainsi le déroulement de l'instance.
Avantages et inconvénients : Les principaux avantages de l'arbitrage sont :
- Rapidité : Les délais sont souvent plus courts que devant les juridictions étatiques (quelques mois en général).
- Confidentialité : Les débats et la sentence arbitrale sont confidentiels, sauf accord contraire des parties.
- Choix des arbitres : Les parties peuvent choisir des arbitres reconnus pour leur expertise dans le domaine concerné par le litige.
- Flexibilité : Les parties peuvent adapter les règles de procédure à leurs besoins. Les sentences arbitrales, qu'elles soient nationales ou internationales (après exequatur), ont force exécutoire. La loi marocaine permet un contrôle judiciaire restreint de la sentence par la Cour d'appel (principalement pour des motifs de procédure ou de compétence) avant son exécution forcée. Le Maroc est signataire de la Convention de New York de 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, ce qui facilite l'exécution des sentences internationales. L'inconvénient principal de l'arbitrage réside souvent dans son coût, qui peut être plus élevé qu'un procès étatique en raison des honoraires des arbitres et des frais administratifs du centre d'arbitrage. De plus, les voies de recours contre une sentence arbitrale sont limitées (principalement un recours en annulation pour des motifs stricts, et non un appel sur le fond).
Médiation et autres modes alternatifs (MARC)
Outre l'arbitrage, d'autres Modes Alternatifs de Résolution des Conflits (MARC) sont encouragés. La médiation, par exemple, est un processus volontaire où un tiers neutre et impartial (le médiateur) aide les parties à trouver elles-mêmes une solution négociée à leur litige. Le CMAC et d'autres organismes proposent également des services de médiation. Des procédures de conciliation judiciaire sont aussi prévues au sein des tribunaux.
Recommandation : Il est fortement conseillé d’insérer une clause de résolution des litiges dans les contrats commerciaux, précisant le mode de résolution privilégié (médiation préalable, arbitrage, compétence judiciaire), le lieu de résolution, et éventuellement la loi applicable. Une clause type pourrait prévoir : « Tout différend découlant du présent contrat ou en relation avec celui-ci sera soumis, au choix de la partie demanderesse, soit au Tribunal de Commerce de Casablanca, soit à l’arbitrage du Centre CMAC de Casablanca selon son règlement en vigueur au moment de l'introduction de la demande d'arbitrage. »
Pour une compréhension plus large des aspects légaux essentiels pour tout investissement au Maroc, consultez notre article de référence : Cadre Juridique des Affaires au Maroc : Guide pour Investisseurs. Pour en savoir plus sur la rédaction des contrats, consultez notre guide sur les clauses essentielles des contrats commerciaux au Maroc.